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Letter to the editors

Connaissances et pratiques des mères en matière d'alimentation des enfants de 0 à 24 mois dans la sous-préfecture de Sibut, République centrafricaine en 2022

Connaissances et pratiques des mères en matière d'alimentation des enfants de 0 à 24 mois dans la sous-préfecture de Sibut, République centrafricaine en 2022

Knowledge and practices of mothers regarding feeding children aged 0 to 24 months in the sub-prefecture of Sibut, Central African Republic in 2022

Ange Donatien Ngouyombo1,2,&, Sylvain Woromogo2, Stéphanie Ines Garoua-Adjou2, Christelle Corinne Folefack Tatsadong3, Rodrigue Herman Doyama-Woza2, Jean de Dieu Longo2,4

 

1Centre Inter-Etats d'Enseignement Supérieur en Santé Publique d'Afrique Centrale, Brazzaville, Congo, 2École Doctorale des Sciences Humaines et Vétérinaires, Université de Bangui, Bangui, République Centrafricaine, 3Ministère de la Santé et de la Population, Bangui, République Centrafricaine, 4Département de Santé Publique, Faculté des Sciences de la Santé, Université de Bangui, Bangui, République Centrafricaine

 

 

&Auteur correspondant
Ange Donatien Ngouyombo, Centre Inter-Etats d'Enseignement Supérieur en Santé Publique d'Afrique Centrale, Brazzaville, Congo

 

 

Aux éditeurs de Pan African Medical Journal    Down

La malnutrition est une condition pathologique résultant des déséquilibres dans l'apport énergétique et/ou nutritionnel d'une personne [1]. Dans les pays en développement, environ 5,4 millions d'enfants de moins de cinq ans meurent chaque année principalement des maladies ayant des causes évitables [2]. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime à environ 2,7 millions le nombre annuel de décès d'enfants imputables à la sous-nutrition, soit 45% de tous les décès d'enfants [3]. Des facteurs individuels, familiaux, communautaires, nationaux et internationaux allant de la maladie, des croyances culturelles et des coutumes, aux faibles conditions économiques et à l'accès limité aux services de santé et sociaux interviennent dans la survenue de la malnutrition. Elle entraîne des séquelles comme l'infirmité, la vulnérabilité chronique aux infections et une baisse des capacités intellectuelles [4].

En République centrafricaine (RCA), les résultats de l'enquête nutritionnelle SMART 2019 révèlent une prévalence nationale de la malnutrition aiguë globale (MAG) de 5,8%, classée comme moyenne selon les critères de l'OMS, et une prévalence de la malnutrition chronique globale (MCG) de 42,3%, indiquant une situation préoccupante pour le développement des enfants [5]. L'amélioration des pratiques d'alimentation du nourrisson et du jeune enfant (ANJE) constitue une stratégie clé pour prévenir la malnutrition. L'OMS recommande notamment l'allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois, suivi de l'introduction d'aliments complémentaires appropriés [6,7]. Malgré l'existence de directives nationales en RCA, les données sur les connaissances et pratiques des mères restent limitées.

Nous avons mené une étude transversale descriptive du 1er au 30 juin 2022 dans la sous-préfecture de Sibut, auprès de 413 mères d'enfants âgés de 0 à 24 mois. Les résultats montrent que 65,6% des mères reconnaissent les bienfaits du colostrum qui est le premier lait sécrété après l'accouchement, 59,8% connaissent l'allaitement exclusif, et 65,4% estiment que les aliments complémentaires dès six mois sont bénéfiques. Toutefois, des idées erronées persistent: 72,9% pensent que le lait de vache est équivalent au lait maternel, et 49,4% croient que l'eau peut être donnée avant six mois (Tableau 1). Concernant les pratiques, bien que toutes les mères aient allaité, seulement 43% ont initié l'allaitement dans l'heure suivant la naissance. Par ailleurs, 56% des enfants de moins de six mois ont reçu des liquides autres que le lait maternel, principalement de l'eau. En matière d'alimentation complémentaire, 32% des nourrissons ont reçu des aliments avant trois mois, et seulement 25% étaient encore sous allaitement exclusif au moment de l'enquête. La fréquence des repas solides après un an reste également insuffisante (Figure 1).

Ces résultats soulignent la nécessité de renforcer les interventions communautaires en matière d'éducation nutritionnelle, qui constitue un levier essentiel pour améliorer les connaissances et les pratiques des mères. En effet, l'éducation nutritionnelle permet non seulement de promouvoir des comportements alimentaires sains, mais aussi de prévenir les formes les plus graves de malnutrition telles que le retard de croissance et l'émaciation. Selon la FAO, l'accès à une éducation nutritionnelle de qualité est vital pour permettre aux individus d'atteindre leur plein potentiel physique et cognitif, et constitue un droit fondamental lié à la sécurité alimentaire [8]. De son côté, l'UNICEF souligne que les programmes de sensibilisation et de conseil nutritionnel auprès des familles sont indispensables pour garantir une alimentation adéquate dès la petite enfance, améliorer les pratiques d'allaitement et d'alimentation complémentaire, et ainsi réduire les risques de malnutrition aiguë et chronique [9,10].

Conclusion: les résultats de cette étude révèlent des insuffisances notables dans les connaissances et les pratiques nutritionnelles des mères à Sibut, malgré une certaine sensibilisation aux recommandations de l'OMS. Ces lacunes contribuent à maintenir une situation nutritionnelle préoccupante chez les enfants de moins de cinq ans. Il est donc impératif de renforcer les interventions communautaires en matière d'éducation nutritionnelle, en s'appuyant sur des stratégies adaptées au contexte local. L'éducation nutritionnelle, reconnue par la FAO et l'UNICEF comme un outil fondamental de prévention, peut améliorer durablement les comportements alimentaires et contribuer à la réduction de la malnutrition infantile en République centrafricaine.

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Ange Donatien Ngouyomboa a mené l'étude initiale (collecte des données et rédaction) ayant abouti à la soutenance de son mémoire de master en nutrition. Il a ensuite contribué à la rédaction du manuscrit. Sylvain Woromogo a lu et approuvé la version finale du manuscrit. Stéphanie Ines Garoua-Adjou et Christelle Corinne Folefack Tatsadong ont contribué à l'enquête terrain. Rodrigue Herman Doyama-Woza a contribué à l'analyse des données. Longo Jean de Dieu a initié et révisé le manuscrit. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Remerciements Up    Down

Nous adressons nos sincères remerciements à Monsieur le Ministre de la Santé et de la Population pour nous avoir accordé l'autorisation de collecte des données dans le cadre de cette étude. Nous exprimons également notre gratitude à l'équipe cadre du district sanitaire de Kémo ainsi qu'au personnel des formations sanitaires sélectionnées, pour leur collaboration et leur disponibilité tout au long de la réalisation de cette enquête. Nos remerciements vont aussi aux enquêteurs, dont l'engagement et le sérieux ont grandement contribué à la qualité des données collectées. Enfin, nous remercions chaleureusement les mères d'enfants qui ont accepté de participer à cette étude et de partager leurs expériences avec bienveillance.

 

 

Tableau et figure Up    Down

Tableau 1: connaissances des mères d'enfant de 0-24 mois en matière d'alimentation infantile

Figure 1: pratique des mères d'enfant de 0-24 mois sur l'alimentation infantile

 

 

Références Up    Down

  1. World Health Organization. Malnutrition. Consulté le 18 mai 2025.

  2. UNICEF. Un enfant de moins de 15 ans meurt toutes les 5 secondes dans le monde. Consulté le 18 mai 2025.

  3. Organisation mondiale de la Santé. Malnutrition. Consulté le 18 mai 2025.

  4. Saunders J, Smith T. Malnutrition: causes and consequences. Clin Med (Lond). 2010 Dec;10(6):624-7. PubMed | Google Scholar

  5. Nzigndo Y, Elimu A, Douam JF, Nadia D. La Situation Nutritionnelle au 31 Mars 2020. Consulté le 18 mai 2025.

  6. World Health Organization (WHO). Infant and young child feeding. Consulté le 18 mai 2025.

  7. World Health Organization. WHO Guideline for complementary feeding of infants and young children 6-23 months of age. World Health Organization; 2023 Oct 13. Google Scholar

  8. Food and Agriculture Organization. Nutrition Education in Primary Schools: A planning guide for curriculum development. Consulté le 18 mai 2025.

  9. UNICEF. Improving Young Children's Diets During the Complementary Feeding Period – UNICEF Programming Guidance, 2020. Consulté le 18 mai 2025.

  10. Child Y. Infant and young child feeding. Nutrition. 2011 May:11-3. Google Scholar