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Original article

Impasse thérapeutique pour une tumeur de la vessie métastatique métachrone à un sarcome de kaposi: à propos d’un cas rare

Impasse thérapeutique pour une tumeur de la vessie métastatique métachrone à un sarcome de kaposi: à propos d’un cas rare

Metastatic bladder metachrone to a kaposi sarcoma cancer at a therapeutic impasse: about a case

Bienvenu Bega Shamalirwa1,&, Omana Wembonyama1, Richepin Tidahy1, Soufiane Mellas1, Jalal Eddine El Ammari1, Mohammed Fadl Tazi1, Moulay Hassan Farih1, Hakima Elmahi2, Ibrahim Sory Sidibe3

 

1Service d'Urologie, CHU Hassan II, Pharmacie de l'Université Sidi Mohamed Ben Abdellah, Fèz, Maroc, 2Service de Dermatologie, CHU Hassan II, Pharmacie de l'Université Sidi Mohamed Ben Abdellah, Fèz, Maroc, 3Laboratoire d'Analyses Anatomo-pathologique, CHU Hassan II de Fèz, Pharmacie de l'Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Fèz, Maroc

 

 

&Auteur correspondant
Bienvenu Bega Shamalirwa, Service d’Urologie, CHU Hassan II, Pharmacie de l’Université Sidi Mohamed Ben Abdellah, Fèz, Maroc

 

 

Résumé

La chimiothérapie est le traitement indiqué pour un carcinome urothélial métastatique de la vessie, la coexistence d'une tumeur de vessie métastatique avec un sarcome de Kaposi pose un sérieux problème d'aggraver le nouveau néoplasie, un cas rare où n'avons pu que confier le patient à sa famille.


English abstract

Chemotherapy is the treatment of choice for a metastatic urothelial bladder cancer. We here report a rare case of metastatic bladder cancer associated with Kaposi sarcoma posing a serious risk of aggravation of the new neoplasia. It was necessary to entrust the patient to his family.

Key words: Metastatic urothelial bladder cancer, Kaposi sarcoma, chemotherapy, immunodepression

 

 

Introduction    Down

Le carcinome urothélial de la vessie, deuxième cancer urologique de l'homme de par sa prévalence, est caractérisé par évolution lente marquée par des récidives et la progression de la pathologie tumorale d'où l'importance d'une prise en charge adéquate. Lorsque le consentement éclairé du patient pose problème, on peut aboutir à une impasse thérapeutique.

 

 

Patient et observation Up    Down

Nous vous rapportons le cas d'un patient de 72 ans, tabagique chronique pendant 10 ans sevré depuis 30 ans, chez qui le diagnostic de carcinome urothélial de la vessie n' infiltrant pas le muscle était posé depuis plus de 12 ans et avait déjà bénéficié de 4 résections trans uréthrale de la vessie puis dans l'évolution, le patient sera perdu de vue durant 3 ans (il ne s'était plus présenté au service pour les contrôles et par conséquent il n'avait pas bénéficié de l'immunothérapie) jusqu'à ce qu'il consulte aux urgences pour une rétention aigue d'urine sur caillots (hématurie caillotante compliquée d'une rétention aigue d'urine), l'échographie vésico-rénale réalisée va mettre en évidence une dilatation urétéro pyélocalicielle bilatérale modérée en amont d'une vessie pour laquelle le patient va bénéficier de la mise en place des néphrostomies bilatérales. On va constater aussi sur le patient; un état cachectique, l'apparition des tâches hémorragiques suspectes au niveau de la plante des pieds (Figure 1, Figure 2) pour lesquelles un avis dermatologique sera sollicité ainsi qu'un bilan d'extension pour actualisation de son état de santé.

 

Le scanner thoraco abdomino-pelvien va conclure à: un processus tissulaire bourgeonnant, infiltrant toute la paroi vésicale (Figure 3) envahissant les méats urétéraux et déterminant une urétéro hydronéphrose modérée bilatérale, des poly adénopathies des 2 chaînes iliaques internes et externes, primitives et lombo aortiques, des lésions ostéolytiques de l'aile iliaque gauche et de l'hémi sacrum homolatéral ainsi que des multiples nodules et micronodules parenchymateux de deux champs pulmonaires évocateurs de lésions métastatiques. L'équipe dermatologique va procéder à une biopsie cutanée de ces lésions, le résultat anatomo pathologique va conclure en faveur d'un Sarcome de Kaposi (Figure 4, Figure 5, Figure 6). Sur le plan de sa pathologie urothélial, le patient sera adressé en oncologie médicale pour une chimiothérapie. Mais au cours des réunions des concertations pluri disciplinaires, il sera relevé que l'immunodépression induite par la chimiothérapie risque d'aggraver sensiblement le sarcome de kaposi constituant ainsi une impasse thérapeutique. La décision finale sera de confier le patient à sa famille, le patient va décéder 2 mois après sa sortie de l'hôpital.

 

 

Discussion Up    Down

La coexistence de plusieurs cancers primitifs chez un même individu est un phénomène connu dans la littérature oncologique avec une fréquence évaluée entre 2,6% et 3,9% tous cancers confondus [1, 2]. La survenue du sarcome de Kaposi convient bien d'être classée dans les tumeurs métachrones [3]. Le sarcome de Kaposi est une néoplasie rare des cellules endothéliales. Il est caractérisé par l'apparition de lésions violacées maculaires qui progressent pour devenir des papules et des plaques quelque fois en nodules et rarement des tumeurs. Le sarcome de Kaposi est décrit comme une pathologie rare survenant chez les immunodéprimés [4] l'immunodépression semble jouer un rôle déterminant au cours de certaines formes de la maladie de Kaposie (sida, transplantés), notre patient avait une séronégativité au VIH et n'a jamais été transplanté. Il n'existe cependant pas, de déficit immunitaire détectable avec nos moyens actuels au cours de la maladie de Kaposi classique. Une prédisposition génétique est possible, mais reste à préciser [5, 6].

 

Toutes fois des facteurs hormonaux [5, 6], l'appartenance au sexe masculin a été rapportée comme un facteur de risque pour développer un Sarcome de Kaposi [7] ajouté au fait que notre patient a été tabagique chronique pendant 10 ans en sachant qu'une étude réalisée par Geodert et al. a noté que le tabagisme est associé avec un taux statistiquement significatif à faible risque de développer un sarcome de kaposi [8]; tous facteurs réunis peuvent expliquer le sarcome de Kaposi chez notre patient. Notre patient était diagnostiqué d'un carcinome urothélial depuis 12 ans, les difficultés que ce patient nous a posé durant son suivi médical, ont permis à ce que sa pathologie puisse récidiver à 4 reprises puis de progresser en un carcinome urothéliale infiltrant le muscle avec des métastases à distance, son cas était devenu une indication de la chimiothérapie malheureusement l'immunodépression que cette chimiothérapie allait induire constituer un risque majeur d'aggraver le sarcome de Kaposi réalisant ainsi un cas de carcinome urothélial de la vessie métastatique avec une impasse thérapeutique.

 

 

Conclusion Up    Down

Le carcinome urothélial infiltrant le muscle vésical avec des métastases à distance constitue une indication de chimiothérapie qui va induire une immunodépression chez le patient mais si cette immunodépression devient un facteur de risque d'aggraver une pathologie comme le sarcome de Kaposi, on se retrouve bien devant une impasse thérapeutique.

 

 

Conflits d’intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Figures Up    Down

Figure 1: lésions cutanées des tâches hémorragiques suspectes au niveau de la plante des pieds (le pied gauche du patient)

Figure 2: zoom sur les lésions cutanées de la plante du pied gauche

Figure 3: coupe transversale du scanner abdomino-pelvien montrant la tumeur de la vessie d’allure infiltrante

Figure 4: coupe histologique au grossissement X5 montrant l’épithélium malpighien hyperkératinisant parakératosique, on note un chorion fait des faisceaux entrecroisés, avec des fentes vasculaires courtes

Figure 5: coupe histologique au grossissement X20 montrant des cellules fusiformes à orientation parallèle et à faisceaux entrecroisés dont une étude immuno-histochimique a été réalisée: les cellules tumorales expriment le CD34

Figure 6: coupe histologique au grossissement X40 montrant des figures de mitoses, des hématies présentes dans la lumière des parois vasculaires, des cellules fusiformes à orientation parallèle et à faisceaux entrecroisés le ki est estimé à environ 10%

 

 

Références Up    Down

  1. Okamoto N, Morio S, Inoue R, Akiyama K. The risk of a second primary cancer occurring in five year survivors of an inititial cancer. Jpn J Clin Oncol. 1987; 17 (3): 205-213. PubMed | Google Scholar

  2. Storm HH, Jensen OM, Ewertz M, Lynge E, Olsen JH, Schou G, Osterlind A. Summary: multiple primary cancer in Denmark, 1943-80. Natl Cancer Inst. Monogr. 1985; 68: 411-430. PubMed | Google Scholar

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  5. Friedman-Birnbaum R, Weltfriend S, Pollack S. Classic Kaposi's sarcoma: t-lymphocyte subsets T4/T8 ratio and NK cell activity. J Am Acad Dermatol. 1991 Jun; 24 (6 Pt 1): 937-40. PubMed | Google Scholar

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